Supplique et débauche
Je ne sais trop si ce sont les souvenirs qui s'estompent.
Je devine aussi qu'ils s'enfouissent profondément pour se
dérober à la narration.
Les mots encensent tout autant qu'ils trahissent.
Il est parfois surprenant de constater que pour des gestes identiques,
certains parviendront à se décliner sur tous les
tons quand les mêmes n'atteindront pas même une
ébauche de balbutiement au prétexte —
galvaudé mais non éculé — de
la plénitude des sentiments.
Alors je le reconnais, à défaut de le clamer, que les
silences ne signifient pas nécessairement
vacuité.
Et de silences à soupirs il n'y a qu'un pas.
Je ne sais si ce sont les souvenirs qui s'estompent.
Parfois ils sont si enchevêtrés qu'ils sont
inextricables.
Je me souviens du lit et des liens qui me liaient à lui.
Je me souviens du lit contre lequel mes cris s'étouffaient
parce que, décidément, ce sont les silences et les
soupirs que j'aime.
Je ne me souviens de ce qui les provoquaient.
Sa main, peut-être.
Oui, sa main, je souhaite que ce soit elle.
Et qu'elle soit nue.
Rien ne brise mieux les silences que les percussions des corps
à corps.
Peau contre peau.
Cuir tendu contre main forte.
De sa main que je désire tant je ne suis plus
très sûre.
Mais de sa voix, elle je m'en souviens bien.
Elle a vibré dans l'air comme mon corps sous sa battue.
Elle a sonné comme le chant de l'oiseau de proie
débusque sa proie
« Tends-toi »
Et je l'ai goûté comme la plus
énivrante, la plus envoûtante des
voluptés
De sa main je ne suis pas sûre.
Mais sa voix, elle, elle résonne encore.
Etourdissante vibration de plaisir.
D'abord de l'entendre puis de lui obéir.
Par pitié, débauchez-moi encore...
C'est ce que Gabrielle a écrit le
mardi 26 septembre 2006 à 00:14
au chapitre vertiges & fantasmagories, page #34
— rss
Commentaires
1. Le mardi 26 septembre 2006 à 14:46, par Un admirateur proche
J'aime l'apparente neutralité du propos, car elle fait vibrer le souvenir évoqué. L'actualiser, comme on dit assez médiocrement, est impossible: "dans les mêmes fleuves, nous entrons et nous n'entrons pas, nous sommes et nous ne sommes pas." Mais le revivifier est un possible, si l'on accepte l'esquive et le biais. Vous en seriez d'accord?
2. Le jeudi 5 octobre 2006 à 08:28, par Placide
je ne sais pas écrire comme vous , mais vos mots sont un délice , surtout loirque nous avons , une communauté de "comportement"...
3. Le samedi 14 octobre 2006 à 17:25, par sourire
émotion...vibration...
que dire de plus lorsqu'il y a déjà l'essentiel...
se taire et relire peut etre
:-)
Ajouter un commentaire
Les commentaires pour ce billet sont fermés.