Les liens plus étroits encore
On ne peut tout écrire.
On peut décrire les mouvements. Ceux du corps et
même ceux de l'âme.
Furioso, Moderato Cantabile ou Largo Con Gran Espressione, tous les
tempos se dictent.
On peut dire les couleurs. Le rouge, le noir et l'or.
On peut aussi esquisser les lueurs, celles qui déflorent la
nuit et parent les corps.
On peut chanter les poèmes. Sur ton uni ou sur des cris.
On peut taire les rires et s'en souvenir intensément.
On peut fredonner les ravissements, les enthousiasmes et les
exaltations.
On peut noircir de mots des pages entières.
Les raturer pour mieux les livrer.
Les caresser pour mieux les plier.
On dessine des traits.
On dore le cadre.
On brosse l'histoire comme d'autres brossent la poussière.
Sauf qu'un jour on sanglote après l'extase.
Sauf qu'un jour, les doigts noirs de l'encre que l'on a fait rouler sur
le papier, on pose sa plume et puis bientôt sa tête
dans ses bras.
Sauf qu'un jour on sait bien que l'on ne pourra pas dire les regards,
dire les silences, dire les baisers et encore moins traduire ce qui est
rire, joie, espoir et gravité à la fois.
Sauf qu'un jour on sait bien que l'on tait l'essentiel. On tait
l'intense. On tait l'essence.
Insensée je suis peut-être. Intrépide
sûrement.
Résolue incontestablement : si on ne peut tout
écrire, cela ne veut pas dire qu'on ne peut le vivre.
Et sans doute mordre la poussière...
C'est ce que Gabrielle a écrit le
mercredi 6 septembre 2006 à 00:27
au chapitre pêle-mêle & culbutis, page #33
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Commentaires
1. Le vendredi 15 septembre 2006 à 13:38, par nature
Je ne crois pas que mourrir fasse partie de nos jeux, aussi extremes puissent-ils être...
2. Le vendredi 15 septembre 2006 à 14:52, par gabrielle
Je tombe des nues en lisant votre commentaire et je me demande bien ce qui, dans ma prose, a pu vous faire accroire une chose pareille, sauf à la réduire à un étroit premier degré que je n'avais pas même envisagé, l'expression "mordre la poussière" ayant perdu son caractère fatal depuis un temps certain.
3. Le lundi 18 septembre 2006 à 15:30, par nature
Mais... nul n'est besoin de t' offusquer ma chère Gabrielle... Après tout ouvrir une question permet (et c'est tres interessant ) de voir comment on y repond!
A bientot (a l'occasion...)
4. Le lundi 18 septembre 2006 à 15:55, par Gabrielle
Mais je ne m'offusquais pas ! Je mesurais simplement la distance qui peut exister entre ce que je souhaitais écrire et ce qui pouvait en être compris. Il y a quelque chose de très étrange à s'apercevoir soudain que le sens que l'on pense évident ne l'est en réalité que pour soi-même !
5. Le lundi 25 septembre 2006 à 17:25, par Gourgandine
Il faut écrire... Pour ne pas oublier... Pour ne pas reléguer au fond, tout au fond des souvenirs, les instants passés, aussi magiques soient ils, car tout peut s'oublier...
Oui, mais voilà, en cela vous avez raison... Parfois, on ne peut pas... Parfois on ne sait pas et parfois on en a tout simplement pas envie...
Des images restent, des sensations, le coeur garde ses secrets, la peau ses frissons, l'âme, les bleus, comme les caresses, et nous vivons...
Mais le vide peut se créer, et la main perd l'habitude...
Alors il faut recommencer, encore, encor, pour ne pas "tout" perdre... Et le souvenir revit...
L'interprétation est toujours quelque chose de "personnelle", les évidences aussi... sourire...
6. Le lundi 25 septembre 2006 à 22:10, par Gabrielle
Gourgandine,
Votre commentaire ne saurait mieux traduire les sentiments qui me traversent en ce moment. Je caresse ma plume en tout sens, je la délie sur le papier, je la fourbis, je la polis, j'en suçote le manche. Et je la repose.
Moins par paresse que par... pudeur...
J'ai pourtant envie de les coucher ces images, ces sensations, ses frissons. Envie de les enrober de mots pour mieux les goûter aussi...
Lire votre commentaire, je l'avoue me donne aussi envie de les partager ! :)
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